Une escroquerie parmi tant d’autres

Observant le travail de fourmis de la Commission européenne, je me disais que la grande escroquerie politique, c’est de nous faire croire que la mission naturelle d’un gouvernement serait de servir le Marché pour qu’il crée des emplois et garantisse à la majorité un esclavage de survie ; cette création étant considérée comme une fin en soi, et sa promesse justifiant tous les renoncements moraux. Ici, Pacte de stabilité et de croissance, là, de compétitivité, ces pactes n’étant que des pacs contre nature entre le Politique et le Marché, mêmement mus par une idéologie mortifère : l’économisme.

 

Faire système

J’en ai après le Marché, c’est vrai, cette grande roue qui nous moud et nous infantilise, et n’ai jamais aimé l’État, ce mal nécessaire. Car je crains tout ce qui fait système.

Faire système ou faire corps, pour le dire en termes spinoziste, c’est d’abord être au service de soi, de sa préservation, c’est-à-dire de sa cohésion, être au service de sa croissance et de sa reproduction. Le corps, chez Spinoza, est à la foi une des formes que prend la substance, et un agrégat d’éléments qui cessent en partie d’exister comme tels pour faire système et exister dans cette forme nouvelle, au service de cette forme. Le corps est donc un conatus subsumé des individus s’abandonnant au tout qu’ils constituent.

L’État, pour des raisons constitutives plus que constitutionnelles, est d’abord au service de l’État ; et ses grands corps faisant corps, ne forment en fait qu’un corps constitué à la logique propre, un corps qui, au plan politique, a subjugué le politique ; le ministre n’étant que le représentant de ce corps, dans un  théâtre pour enfants où tout est fait pour donner l’illusion que Guignol vit et parle, alors que c’est bien la volonté de l’administration qui tire toutes les ficelles et fait danser le ministre, et la voix de l’État qui toujours se fait entendre. Les ministres passent, les hauts fonctionnaires restent. Ça me fait un peu penser à la fin du cycle mérovingien en Francie. Les rois chevelus n’avaient plus aucun pouvoir. Ils gagnaient le palais, vautrés dans leur char tiré par des bœufs, recevaient les ambassadeurs, leur disant ce qu’on voulait qu’ils entendent, mais c’était le maire du palais qui gouvernait et imposait sa politique. Jusqu’au jour où, avec l’accord du pape, on prit Childéric III pour le tondre, avant de l’enfermer dans un monastère, et Pépin III le petit, fils de Charles, celui au marteau, et père du sérénissime auguste, Charles le grand, reçut de Zacharie la couronne royale. En France contemporaine, c’est par la votation populaire que les hauts fonctionnaires accèdent au pourvoir.

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