Petit aphorisme, dans l’esprit nietzschéen, à méditer pendant les vacances : la fin de l’humanité est peut-être sa fin comme humanité.
Je veux dire par là que, s’il existe un sens de l’Histoire, un inévitable progrès de homme comme espèce, une perspective définitive, la finalité du développement de l’humanité, c’est peut-être, justement, la disparition de l’humanité comme genre, de l’humain comme objet ; au profit de l’homme et au bénéfice de sa reconnaissance comme être singulier irréductible à quoi que ce soit, irréductible à son humanité même.
Et je crois à cette perspective du surhumain, au moins comme perspective morale, car je n’ai pas l’esprit assez religieux pour y croire comme eschatologie. Nietzsche est clair sur ce point :
« L’homme est une corde tendue entre l’animal et le surhumain – une corde par-dessus un abîme ».[1]
J’y crois comme perspective anthropologique, mais aussi politique. Et c’est pourquoi je milite pour l’avènement d’une vraie démocratie, qui, je le rappelle, n’est pas l’élection au suffrage universel de représentants du peuple proposés par (puis choisis dans) les partis politiques, mais bien l’abolition des rapports dominant-dominé, c’est-à-dire la fin, dans l’espace public, dans le registre relationnel, de toute hiérarchie, autrement dit la laïcité[2]. Ce temps sera aussi le temps nouveau du dépassement du concept – chrétien – d’égalité, de l’égalité des moutons dans le troupeau (restons nietzschéen jusqu’au bout ! mais comment pourrais-je faire autrement ?), et l’avènement d’un monde où les hommes seront incomparables, incommensurables, insoumis ; et ils pourront être qualifiés d’anégaux – comme on dirait amoraux.
[1]. Dans le prologue d’« Ainsi parlait Zarathoustra ».
[2]. Pour mieux comprendre les concepts de démocratie et de laïcité que je défends et cette idée, a priori « curieuse », d’assimiler ces deux concepts, je renvoie à la lecture de mon plaidoyer pour la démocratie (excellente lecture de plage).