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Etiologie d’une décadence

Si la question migratoire qui focalise tant l’extrême droite pourrait se regarder tout autrement dans un tout autre contexte, elle devient aujourd’hui non pas critique, mais létale. Car l’Occident est effectivement confronté à des attaques extrêmement violentes dans un contexte de décadence – je renvoie à mon essai « Etiologie d’une décadence. Et il est sidérant de comparer notre situation à celle de l‘Empire romain des premiers siècles de notre ère : une civilisation décadence, incapable, faute de volonté, de se défendre, par ailleurs confrontée à des hordes de barbares (barbares, au sens antique du terme, c’est-à-dire extérieur à la civilisation romaine) qui pénètrent l’Empire et le pillent après avoir fracturé son « limes » ; et dans le même temps détruite de l’intérieur par une secte religieuse qui l’infecte et finira par avoir le dessus – pour reprendre la formule du Lucien Jerphagnon, « l’agneau aura mangé la louve »[1]. Et cette secte n’est pas, comme à l’époque que j’évoque, préchrétienne ; elle est, en ce début du siècle, postchrétienne, une nouvelle secte d’éveillés qui est en train de devenir une religion à part entière et qui, comme toutes, est totalitaire, haineuse des libertés individuelles, prête à remettre en cause les faits et les sciences qui en rendent compte chaque fois qu’ils diffèrent de leurs présupposés, de leurs croyances, de leurs désirs. J’ignore si nous nous en sortirons, mais cela parait peu probable, car pour cela, il faudrait déjà que face à ces éveillés wokes, les populations occidentales se réveillent aussi, retrouvent du courage, et rompent avec une classe politique qui les trahit tous les jours. Rien de cela ne parait envisageable. Je remarquais qu’aux dernières élections municipales, dans ma ville, près de 70 % des électeurs ne s’étaient pas déplacés. Pour différentes raisons, et pour l’essentiel, ils s’en foutent et ne constituent qu’un ventre mou, un troupeau de moutons castrés et gras. Soljenitsyne déclarait à Harvard en 1978 que « le déclin du courage est peut-être ce qui frappe le plus un regard étranger dans l’Occident d’aujourd’hui ». Son compatriote Vladimir Boukovski ne disait pas autre chose dans son livre « Jugement à Moscou ». On voit, n’en déplaise à Sardine Ruisseau que nous aurions besoin pour nous en sortir d’une politique « couillue » – je prends ce terme dans mon Petit Robert (aucun rapport avec un petit ou un gros lolo) –, menée par des hommes et des femmes également couillus et déterminés.


[1]. Je fais référence au magnifique roman de Lucien Jerphagnon, « La louve et l’agneau ».

Entredeux métaphysique

De même que je refuse de me laisser enfermer dans ce choix auquel parfois on m’invite, de me déclarer croyant ou athée, ou encore de confesser une philosophie spiritualiste ou matérialiste, je refuse au nom de mon individualisme forcené d’opposer le « je » et le « nous ». Je reprends ! quitte à céder à une certaine redite…

Déclarer, comme à la douane, croire en Dieu, à l’existence de divinités, d’un empyrée d’où des dieux fantasques nous regarderaient comme le Micromégas de Voltaire – cet exilé de Sirius – et son ami de Saturne, ou au contraire prétendre que les dieux n’existent pas, c’est toujours, à défaut d’en savoir quelque chose, croire. Je n’y souscris pas et, faute d’intuition claire, ne crois donc à rien, en cette matière du moins, et sans être le moins du monde agnostique.  

Quant à trancher entre matérialisme et spiritualisme, j’en reste là encore à la position de Voltaire sur la matière, telle qu’il l’évoque, toujours dans Micromégas : « Eh bien ! dit le Sirien, cette chose qui te parait être divisible, pesante et grise, me dirais-tu bien ce que c’est ? Tu vois quelques attributs ; mais le fond de la chose, le connais-tu ? – Non, dit l’autre. – Tu ne sais donc point ce que c’est que la matière ». J’en suis là, précisément, à ce point d’ignorance. La science nous le dit, à trop diviser les atomes, comme un oignon qu’on épluche, on finit par ne plus trouver que du vide, et de l’énergie. Et les êtres vivants ne seraient-ils pas que des arrangements de matière organique qui pensent, et l’esprit le produit d’une matière vivante ? Nul n’a encore apporté la preuve que l’esprit survit à la mort du corps ; mais qui pourrait affirmer le contraire ? Et si la matière est une réalité sensible, une pensée est tout aussi réelle, mais sous une autre forme et dès qu’elle est exprimée, elle a sa vie propre.

Enfin, je n’opposerai pas l’homme social et l’homme individuel. Mais je prétends que chacun d’entre nous est unique et se distingue des autres, même à l’intérieur de groupes sociaux apparemment très homogènes. Il n’y a donc pas d’homme universel, même si les humains partagent tous des caractères communs. Sinon l’anthropologie serait une science sans sujet. Et quand Joseph de Maistre écrit dans ses considérations sur la France : « Il n’y a pas d’homme dans le monde. J’ai vu, dans ma vie, des Français, des Italiens, des Russes, etc. ; Je sais même, grâce à Montesquieu, qu’on peut être persan : mais quant à l’homme ; je déclare ne l’avoir rencontré de ma vie », on peut lui rétorquer qu’il ne l’a simplement pas reconnu dans le Français, l’Anglais ou le Russe. Mais aucun homme n’est réductible à sa nationalité, à la religion de ses parents, ou encore à son sexe, sa couleur de peau, son statut social. Et si ses déterminismes naturels sont indépassables (sa nature, son sexe, sa race, ses principaux caractères morphologiques), il est libre de dépasser ou de s’affranchir des autres dons de sa naissance, de changer de nationalité ou de religion, d’appréhender une nouvelle culture, de s’extraire de son milieu social d’origine. Mais dans le même temps, il ne peut vivre qu’en société, engagé dans des liens choisis, parfois subis, qui le rattachent à d’autres, et, de mon point de vue, enraciné sur un territoire auprès de voisins. Mais sans abdiquer son individualité. Et personnellement, si j’admets l’évidence, à savoir que je suis un homme occidental blanc hétérosexuel, dire cela ne dit rien de ce que suis et montre à quel point on ignore ou on ne souhaite pas s’attarder à ce que je suis vraiment, comme être unique constitué pour un destin singulier et porteur d’une identité multiple, complexe et relativement fluide.  

Un Singe en Automne

Un peu de pub

Ce n’est évidemment pas dans mes habitudes, mais chacun comprendra que l’on puisse aussi écrire pour être lu. Il faut donc toucher un certain « public », donc diffuser ses livres. D’ailleurs, je ne sais pas si à terme je n’abandonnerai pas les chroniques pour me consacrer aux livres. J’en ai un qui cherche vainement un éditeur, et un autre, un roman, qui sera terminé à l’automne. Et puis encore un essai de philosophie politique débuté il y a quelques semaines et qui sera sans doute le dernier – à publier l’année prochaine. Et puis, en fin d’année 2023 un autre recueil de chroniques et un nouveau roman auquel je pense déjà. Ces livres ont été, sont et seront publiés par des éditeurs « classiques », et certains en autoédition et il faudra bien que je les vende. Il s’agit notamment de : « Un singe en automne » et de « Jean Mousnier de la Montagne ». Ces livres sont présentés sur ce site à la page « Parutions ». Leur prix d’achat correspond à peine à leur coût de fabrication, donc sans rémunération pour l’auteur.

Il est très difficile de se faire éditer ; et on doit distinguer les vrais éditeurs (qui éditent à compte d’éditeur), les faux qui éditent moyennant finances ou prétendent le faire gratuitement (éditions à compte d’auteur), et les auto éditeurs. Et je peux en dire deux mots. Il y a encore deux types d’éditeurs traditionnels, ceux que je classe dans la première catégorie : les grands qui assurent la promotion de leurs auteurs, et les petits qui ne le font pas, faute de moyens. Sachant que le problème d’un livre, ce n’est pas de l’écrire, on peut se faire aider, ou même, comme certains, laisser d’autres l’écrire à sa place ; le problème, c’est de le promouvoir, de faire qu’on en parle à la télé ou à la radio et qu’il soit présent à l’étal des librairies et des super marchés. Entre l’écriture et la promotion, il y a la fabrication du livre, mais fabriquer un livre ce n’est pas grand-chose. Personnellement, je continuerai à me faire éditer quand je le pourrais par de vrais éditeurs (à compte d’éditeur) et pratiquerais l’autoédition à défaut. Je n’aime pas beaucoup les faux éditeurs éditant à compte d’auteur ou gratuitement, car ils ne font aucune promotion des livres qui ne se vendent donc pas faute d’être identifiés – personne n’achète en effet un livre dont il ignore l’existence. Et surtout, ces éditeurs ne sont jamais clairs sur leur métier et quand ils prétendent faire le travail gratuitement, ils impriment votre livre et se rémunèrent donc sur l’impression. Quand au service d’Amazon, il est très pauvre : éditer par eux, c’est être sûr d’obtenir un « objet-livre » assez laid, sans pouvoir maitriser sa qualité. En conclusion de quoi, parmi 7 ouvrages édités, j’en ai édité 3 en Autoédition. Par contre, restent les problèmes du référencement, malgré l’ISBN, quasi impossible sans numéro fiscal et la promotion/diffusion qui reste le problème d’écrivains qui n’ont aucun talent pour la com ou le commerce. Car tout le problème, c’est la promotion. Un mauvais livre bien promu se vendra alors qu’un excellent livre non promu ne se vendra pas. Et à ces pseudo éditeurs qui prospèrent sur le net, on doit demander chaque fois : quelle garantie me donnez-vous que le livre soit présenté en librairie ou dans les espaces livres de super marchés ?

A vôté !

C’est fait, les Français ont voté ; ou plutôt, non ! majoritairement, ils s’en sont abstenus. Et s’ils n’ont pas voté à 53,77 %, ils ont refusé au Chef de l’état la majorité. Et dans ce cadre singulier de la Cinquième république, la REM ayant été désavouée, le Président n’a pas de légitimité gouvernementale et la grande majorité des députés – qui ont obtenu la majorité d’une minorité de votants –, non plus…

Mais on ne manquera pas de continuer à déclarer à l’occasion que la France fait partie des « grandes démocraties », de ces grands pays occidentaux qui prétendent façonner le monde à leur image et dont l’un est dirigé par un vieillard sénile, l’autre par un jeune homme puéril.

L’humanité a su concevoir deux types de démocratie, correspondant à des civilisations aux valeurs opposées : la démocratie directe pour un monde guerrier, viril, dont les premières vertus étaient l’honneur, le goût de la liberté, l’individualisme ; et un monde bourgeois, efféminé, dont les premières vertus sont le gout de la compromission, l’égalitarisme et le conformisme. Hier la guerre, aujourd’hui le commerce. Chaque civilisation a donc dû adapter un mode de démocratie : dans les cités grecques, une démocratie directe et aristocratique, en occident chrétien, une démocratie représentative et populaire. Mais le fait est que notre démocratie a été dévoyée par la bourgeoisie et l’administration. Aujourd’hui elle a cessé d’être populaire et nos représentants, non seulement ne sont pas représentatifs, mais ils ne représentent pas les citoyens, mais des partis politiques.

Notre système est donc en faillite, et il vaudrait mieux en sortir, donc tourner le dos à notre Cinquième république présidentielle (de Gaulle est mort) et ne pas retourner à la Quatrième (donc combattre l’organisation partisane). Il y a des solutions, elles sont connues. Mais pourquoi voulez-vous que les tenants du système lâchent ce système qui constitue leur rente ?

Deux actualités

Je m’étais promis de ne plus parler de politique, ou d’en parler moins, de m’en extraire ; aussi, parallèlement à l’écriture d’un roman qui progresse trop lentement – une façon de m’échapper de l’actualité en faisant un retour à 1984, l’année –, je préparais un court texte sur le « Socrate de Platon », comme on pourrait dire le « Jésus de Paul de Tarse », celui du chemin de Damas. Mais l’agacement étant trop grand, je veux évoquer deux actualités, sans rapport ; encore que… L’affaire Abad et la tuerie de ce jour, au Texas, et porter sur ces actualités un regard proprement « philosophique ». Socrate attendra.

Oui, la philosophie est d’abord un regard, une « optique », et je rajouterai, quitte à paraphraser un peu Levinas, « une optique spirituelle » – il écrit en effet dans « Totalité et infini » que « L’éthique, déjà par elle-même, est une « optique » ; et ailleurs que « L’éthique est l’optique spirituelle ».

Évidemment, je n’ai rien à dire sur les accusations de viol portées contre Damien Abad, du moins rien d’original. Mais j’entendais Sandrine Rousseau exiger la démission du nouveau ministre des Solidarités, en déclarant sur RTL, hier 24 mai : « Il doit être démis par principe de précaution ».https://www.youtube.com/watch?v=T7wSod9Jni8

Et je veux m’arrêter sur cette phrase qui montre, non pas au fond, mais sur la forme ce qu’est le wokisme : une escroquerie intellectuelle grossière qui consiste à mésuser des mots et des concepts, dans une pure démarche de propagande moraliste. Faut-il rappeler qu’une militante écologiste ne devrait pas abuser les auditeurs avec un principe de précaution – aujourd’hui entré dans notre constitution – qui a été défini et entériné lors du sommet de Rio de 1992, et qui expose que « malgré l’absence de certitudes, à un moment donné, due à un manque de connaissances techniques, scientifiques ou économiques, il convient de prendre des mesures anticipatives de gestion de risques eu égard aux dommages potentiels immédiats et futurs sur l’environnement et la santé ». Transposons le cas à M. Abad, puisque la militante écolo-féministe woke nous y invite en nous proposant de faire ce pas idéologique de la vessie à la lanterne : nous n’avons effectivement aucune certitude sur l’existence, chez lui, de pulsions sexuelles irrépressibles de nature à le pousser au viol. Mais où est le « risque eu égard aux dommages potentiels immédiats et futurs … » ? Risque qu’il agresse Mme Borne ou une autre ministre en Conseil ? Si risque il y a, la solution n’est pas de lui interdire l’accès à Matignon ou aux bureaux de son ministère, car ce ne serait que déplacer le problème ; la seule façon de réduire le risque à zéro serait de l’enfermer. On voit donc, sujet politique sans doute, mais débat philosophique surtout, que s’opposent ici deux principes, la présomption d’innocence et le principe de précaution. Et là où Sandrine Rousseau se montre être une « escroque », c’est quand elle confond présomption d’innocence et d’innocuité, pour pervertir, façon woke, un principe de précaution environnementale que tout le monde accepte, en un prétendu principe de précaution morale tout à fait contestable, car nauséeux. Et elle utilise alors toute la triste mécanique woke : torsion des concepts, injonction morale, dialectique sophistique et foireuse, pensée totalitaire. Pourquoi totalitaire ? Car considérer que l’on peut disqualifier, écarter, ostraciser une personne dont on ne peut encore contester l’innocence, c’est une démarche totalitaire récurrente des régimes les plus détestables, car elle permet d’enfermer tous les suspects, toutes les personnes dénoncées, dans une démarche trop connue. Et on comprend alors pourquoi on lit parfois, s’agissant d’un certain écologisme, cette formule de Khmers verts.

Autre sujet, encore plus dramatique – et si l’on peut faire peut-être un lien, entre les deux, c’est par la violence des images de notre société que les médias nous renvoient : une nouvelle tuerie dans une école aux États-Unis. Comme si la guerre en Ukraine ne suffisait pas… J’entends déjà que certains plaident ici et là-bas sur la nécessité d’interdire la vente d’armes. Et je suis étonné que comme pour le dérèglement climatique – oui, j’ai bien l’intention de mélanger un peu les choses –, on ne souhaite jamais aller au fond des choses, orientant puis focalisant les problèmes loin de leurs causes, comme si on ne voulait surtout pas y aller vraiment voir. Nos vrais problèmes, et ils sont liés, sont, non pas le dérèglement climatique, mais la destruction de l’environnement qui a bien d’autres conséquences, aussi graves que la dérive climatique ; non pas la circulation des armes, mais la violence de la société américaine, c’est-à-dire, pour une grande part des médias. Et je pense à cette formule de Régis Debray, peut-être entendue à la radio – je ne sais plus – qui disait que les états européens étaient devenus des pays américains comme les autres. Il le redit d’ailleurs dans un de ses dernières parutions, « le siècle vert », l’an passé, en nous traitant de « gallo-ricains ».

Et c’est pourquoi, je ne veux débattre ni du dérèglement climatique ni de l’interdiction de la vente des armes, me réservant pour des débats qui n’auront pas lieu, du moins tant que les médias ne sortiront pas de leur médiocrité et donneront à entendre sans la dénoncer la pensée woke. Et d’ici là, je vais revenir à Socrate.