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Oui, ça m’a énervé

Je lis cela couché, vautré sur la jaquette d’un livre sur le développement personnel – développement personnel ! un concept dont la prétention m’a toujours fait gerber : « une leçon de bonheur », ou encore cette autre perle éditoriale : « Il n‘est pas nécessaire d’être milliardaire pour être heureux ». Affligeant ! à ne plus savoir comment trouver les mots… Si l’on veut dire que « l’argent ne fait pas le bonheur », prétendue vieille sagesse populaire, en fait un truisme assez grossier, c’est un peu court. Qu’on se le dise entre amis, à l’apéro, je veux bien, mais qu’on en fasse l’accroche d’une prétendue leçon de bonheur…

Évidemment que l’argent ne fait pas le bonheur – Tiens, j’en parlerai à mon banquier, je lui dirai que c’est Macron qui me l’a dit… –, mais en avoir n’est nullement un obstacle et peut parfois consoler, voire distraire. Mais surtout, soyons clair, ce système que nous avons construit en Occident, qui taxe l’eau que l’on boit et bientôt l’air que l’on respire, un système qui a privatisé tout ce qui existe sur terre, y compris ce qui est biologiquement nécessaire à notre survie individuelle, c’est-à-dire qui se le réserve ou le réserve aux personnes en capacité de se le payer, fait qu’il est illusoire d’espérer y être heureux si l’on est pauvre. Et d’ailleurs, comment le pourrait-on quand, le Marché, mais surtout toute la technocratie et la médiacratie, méprise les pauvres, et ne respecte pas leur dignité ? Pas plus qu’on n’y respecte les vieux ou les malades. Et encore moins dans un pays, le nôtre, où l’on n’accepte pas qu’un vieux, fatigué, considérant avoir fait son temps, décide de mourir, de sa main, à son heure. Non, c’est au système de décider de cela. Et si je ne sais pas si, comme on le prétend, « tous les hommes naissent libres… » – en fait, j’ai quand même ma petite idée –, à l’évidence, on n’est pas libre de mourir à son heure choisie. Et puis…, mais cessons là.

Mais qui peut prétendre donner des conseils ou des leçons de bonheur ? Oui, donner des conseils de développement personnel, en faire son métier et faire du fric en expliquant que l’argent ne fait pas le bonheur. Et vendre sa soupe à la télé ou à l’étal d’une librairie à des bobos qui mangent bio, mais qui acceptent volontiers de vivre dans des cubes de béton, sans plus aucun contact avec la nature et acceptent si facilement d’être les sujets disciplinés et propres sur eux de « l’Empire du Bien » – j’emprunte évidemment ce concept à Philippe Muray.

En fait, la seule justification de l’élaboration de contes moraux, je pense à Tolstoï, je pense à Voltaire…, la seule justification aux romans ou au Théâtre d’édification, c’est bien, soit l’engagement politique ou religieux, soit un goût authentique pour la littérature et les arts.