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Au moins trois raisons de ne pas voter aux Européennes

C’est décidé, je n’irai pas, et le temps qu’il fait – plutôt beau en Bretagne –, ce que j’ai à faire par ailleurs – plutôt dense – n’y sont pour rien. Je ne consentirai pas à ce rituel, car je n’en vois aucune raison qui tienne à l’analyse plus longtemps qu’un passage dans l’isoloir.

Tout d’abord, mon vote ne servirait à rien, car que vaut une voix sur quelques centaines de millions ? Autant jouer à l’euromillion ! Ce qui me laisse à penser qu’une élection, dans un corps électoral si vaste, n’a aucun sens, et ne peut que dissoudre le processus démocratique ; le dissoudre, donc le ruiner.

Mais si, sur le registre de l’efficacité, mon vote ne servait à rien, peut-être aurait-il quelques vertus en me permettant, par exemple, de communier, dans cet acte objectivement gratuit, avec la communauté à laquelle j’appartiens. Mais non seulement, je ne vois pas cette communauté, mais je n’en vois pas l’embryon en gestation. Je vis en France, à l’extrême ouest du continent européen, mais je me sens plus proche d’un américain new-yorkais ou d’un slave moscovite, que d’un islamiste radical de Vaulx-en-Velin, ou d’un sikh londonien. Et s’agissant des valeurs de l’Europe, l’égalité, l’argent, le travail, ce ne sont pas les miennes.

Je ne me raccrochai donc pas à cette idée de faire corps, de « faire Europe », comme les gens qui parlent la novlangue cul-cultureuse nous le disent aujourd’hui. Reste la défense de l’idée de démocratie. Et bien, justement, je suis trop attaché à la démocratie, trop militant de la chose publique, pour accepter de cautionner cette consultation. La démocratie, ce n’est pas cela. Quand les gens comprendront-ils que, non seulement la démocratie ne se réduit pas au suffrage universel, mais que ce mode de désignation des députés n’est ni garante, ni même nécessaire à la démocratie ? D’ailleurs, et la chose est encore plus claire pour ce type d’élections, on ne demande pas ici aux citoyens de choisir des députés, mais de partager le pouvoir entre quelques partis politiques. Car personne ne connait les candidats, ce qu’ils ont dans le ventre ou dans la tête, ce qu’ils pensent, ce qu’ils veulent. Cette consultation n’est donc qu’un sondage, pour savoir si l’européen, formaté par le système transfrontalier, se revendique à droite ou gauche, et plus ou moins loin du centre de gravité d’une classe politique apolitique et carriériste. Décidément, cela ne me concerne pas. Et pourtant l’eurosceptique qui conclut ici cette courte chronique, reste partisan convaincu de la construction d’une Europe sociale, économique et morale, donc europhile.