Prolongeons un peu le propos sur deux points

Insistant sur les dynamiques de convergence, j’évoquais la mondialisation de l’économie qui doit beaucoup à la puissance historique de l’Occident et à l’adoption de l’économie de marché par la Chine, l’Inde ou la Turquie notamment. Mais sans doute n’ai-je pas assez souligné un autre aspect ; cette mondialisation a semblé signer la fin de la politique, ou la fin de l’histoire de la politique, mais a produit, en fait, et en réaction, l’émergence politique de ce que la démagogie institutionnelle appelle populisme, et qui est donc aussi, une conséquence de cette mondialisation et de ces phénomènes de convergence. Le schéma est « globalement » simple : la croissance naturelle du marché a pour conséquence un phénomène de convergence, de normalisation et de nivellement qui induit une bureaucratisation d’un monde devenu plat avec de moins en moins d’aspérités, et à laquelle répondent certaines radicalités, notamment populistes. À ce rabotage des singularités culturelles et de dilution des identités, se sont rajoutés sur notre continent, la création de l’U.E. et son choix de substituer aux nationalités construites depuis la partition de l’empire de Charlemagne au traité de Verdun, un nationalisme européen inconsistant. Il suffisait alors, griotte sur le gâteau, de rajouter deux grosses erreurs stratégiques, le refus en 2005 de reconnaitre les origines chrétiennes de l’Europe – alors que c’est bien le pape Léon qui fait de Charles, roi des Francs et des Lombards, l’empereur romain d’occident (Imperator et Basileus) –, et le projet jamais dénoncé de faire entrer la Turquie dans l’U.E., rendant illusoire l’idée de construire une identité européenne.

 

Autre point, autre sujet. Il fut un temps quand, en France, existait un Commissariat général du Plan. Il fut créé en 1946, et ce type de planification de notre avenir national perdurera un demi-siècle. Aujourd’hui, cela n’est plus de mise, car, considérant que notre avenir ne dépend plus de nous dans un système mondialisé, acceptant l’impuissance des gouvernements face à un développement historique dont la caractéristique principale semble être son inéluctabilité et son absence d’alternatives, les politiques ont donc jeté l’éponge ; et cette démission a fait le lit des hauts fonctionnaires qui, à l’heure où il convenait d’abandonner toute idéologie pour s’en tenir à la gestion des catastrophes provoquées par la Marché, ont pu légitiment considérer qu’ils étaient les seuls à avoir l’expertise et l’autorité pour gouverner, et corriger ce qui devait l’être.

Mais cette idée de la prévalence de l’efficacité gestionnaire sur l’action politique (prégnante depuis la chute du mur), cette revendication à abandonner toute idéologie (de droite ou de gauche) pour s’en tenir aux lois économiques, à ce qui marcherait, et qui, à l’évidence, ne marche pas, est évidemment hautement idéologique. Oui, prétendre que l’économie pourrait se substituer à la politique, et que l’aspiration au gouvernement du peuple est risible, est une escroquerie intellectuelle de plus : choses démagogiques, trop démagogiques… Et le populisme est aujourd’hui, malheureusement, la seule réaction opérante face à cette dérive.

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