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Articles politiques

Mes vœux pour 2014

 Je prolonge cette idée de lent raffinage des valeurs – une façon pudique et élégante d’évoquer la vieillesse – pour témoigner du fait qu’il ne faut pas aller chercher bien loin les fondements de la morale. Et que les trouvant dans la nature, c’est-à-dire dans la vérité indépassable des êtres et des choses, nous pourrions la formuler ainsi : Chacun de nous ayant des capacités innées et acquises propres, notre liberté, mais plus encore notre devoir, est d’en user avec tempérance et sans excès, dans le respect des autres et de nous-mêmes. Rajoutons : et d’en assumer la responsabilité. Car la vie n’est qu’un trop court moment de jouissance ; et qui ne trouve précisément sa justification que dans la jouissance qu’elle rend possible à des êtres conscients. Et les concepts de droit et de liberté s’inscrivent dans ce cadre naturel déterminé par Dieu, selon les plus optimistes, ou par une forme de fatalité, si l’on veut prendre toute la mesure de ce flacon à moitié plein, mais toujours trop vide, ou bien encore, selon d’autres conceptions, par un hasard obéissant à des lois mécaniques et probablement relativistes. Et si nous pouvons revendiquer ce droit naturel, qui est aussi celui de vivre selon notre nature, nous devons aussi comprendre et accepter que les autres en usent pareillement. Tout le reste, c’est un peu de la littérature… en fait, un peu moins que cela, de la philosophie qui tourne en rond autour d’un point nodal, gordien, qu’elle cherche, un peu comme en cuisine on épluche un oignon en espérant en trouver le cœur ; ou, si l’image ne vous parle pas, comme les anciens investiguaient la matière en quête de l’insécable constituant : insécable, en grec ἄτομος [átomos], l’atome. Il faut donc, de mon point de vue, s’en tenir à la nature, ce qui n’est ni facile à conceptualiser ni si simple à faire. Mais, plus les années passent et plus j’entrevois mon retour prochain à l’humus de la nature, plus j’y vois, un peu comme Épicure ou Diogène, l’alpha et l’oméga de notre existence. Mais, formellement, on peut choisir d’exprimer cette vérité première et ultime de plusieurs manières, suivant différentes écoles philosophiques. Mais comment le dire plus simplement qu’en évoquant la liberté d’être ce que la nature et la vie nous ont fait et d’exercer ses dons dans le respect des autres ? « La liberté des uns s’arrête là ou commence celles des autres », autrement dit, un intérêt général qui ruine les libertés individuelles n’est pas moralement acceptable. Et les seuls débats démocratiques que nous devrions avoir – c’est un vœu pieux, mais vain, pour 2024 – sont d’une part celui du transhumanisme et d’autre part celui de la dérive totalitaire des systèmes bureaucratiques.

D’abord le transhumanisme, car c’est un nihilisme, ce qu’il faut bien comprendre… Car le transhumanisme est l’ultime étape d’un projet qui, après avoir réifié le monde, exploité la nature et l’homme, veut s’affranchir définitivement de la nature en concevant in vitro un transhumain non naturel. Et violer la nature en prétendant la dépasser, c’est briser le cadre moral naturel, c’est-à-dire saper les fondements de la morale. Une certaine façon de réaffirmer de manière définitive « Dieu est mort ». Et lorsque je reprends cette formulation nietzschéenne, je pense d’abord à la clarification de Spinoza « Deus sive natura ». Le nihilisme s’exprime ainsi : « Dieu, c’est-à-dire la nature, c’est mort ! », on s’en fout… Nique ta mère ! – et ton père… Dieu ou Maïa… La « morale » transhumaniste sera, non pas transhumaine, inhumaine, mais sans cadre, et surtout sans fondement, non pas comme une ile dont le socle sous-marin se détacherait du plancher océanique et qui dériverait sur le grand bleu, poussé par les courants, ballotté par le vent, mais comme tout un continent à la dérive : une morale amorale, sans valeur, ou du moins sans autres valeurs que consumériste.

L’autre question qui mériterait enfin un vrai débat est celle des libertés. Au prétexte de protéger notre vie, notre santé, notre confort, notre avenir, une autre prétendue morale « humaniste », les systèmes bureaucratiques qui gouvernent nos vies n’ont de cesse de raboter nos libertés, alors que le seul objet de la politique est de garantir les libertés individuelles et une forme de justice sociale. Les libertés individuelles forment – reprenons cette expression pour insister sur ce parallèle – l’alpha et l’oméga de la politique. Et le système qui nous gouverne, tiré par l’attelage fatal du Marché et de la Bureaucratie, peut être jugé à l’aune de ce principe. Faisons l’exercice ! Nous perdons chaque année des libertés individuelles et la justice sociale est de moins en moins garantie dans un monde où l’écart entre les riches et les pauvres ne cesse de croitre. Et notre sécurité n’est même pas assurée par des policiers équipés comme des soldats au front. Parler de faillite n’est donc pas une outrance. Pourtant la classe politique qui en assume une partie de la responsabilité n’envisage pas de dégager, elle s’accroche à ses privilèges… Et le système n’envisage pas de se réformer : aucun parti politique de La France Insoumise au RN ne propose de changer de système ; ils veulent seulement prendre le pouvoir et en jouir.

L’humanité est donc en train, sans l’avoir vraiment décidé, mais guidé par une prétendue élite de responsables de très grandes entreprises et de hauts fonctionnaires, dans une relative indifférence générale, de poursuivre sa longue marche vers des terres désertiques, un eldorado fantasmé et fatal, après avoir rompu avec tout ce qui pouvait lui servir de cadre moral, et avoir cassé la seule boussole qui pouvait encore l’aider à ne pas se perdre : la perspective de la liberté humaine. Bonne année et bonne route !

Youpi! nouvelle année

On est toujours condamné à se répéter ou à se contredire. Je ne crois pas me contredire beaucoup… mais est-ce vraiment une qualité ? Et à défaut de raffinement, les années qui s’accumulent, comme des boites de conserve vides entassées dans une décharge, forment un lent processus de raffinage de mes angoisses et de mes colères. Non seulement je comprends aujourd’hui mieux ce que je suis, mais je l’accepte comme une fatalité décrétée par un esprit malin, un sacré esprit malin ludique jusqu’à la perversion. Notez que j’avais écrit ici : « putain d’esprit malin », mais vous n’aimez pas les grossièretés, et puis « sacré » renvoie à une dimension divine, celle d’un ange déchu qui s’amuse, lassé des frasques d’une Lilith qui lui est devenu un peu ce que Xanthippe est à Socrate, une chieuse. En fait, il faudrait creuser tout cela, labourer cette matrice à coup de tête ou de rein. Mais ma langue s’égare et je sens qu’à tant de grivoiserie, vous allez vous fâcher. Pourtant, si je me sens prêt à entrer bientôt en enfer, c’est à condition que Lilith en soit la gardienne… Xanthippe, non ! j’ai déjà donné, et cet enfer dure…

Je parlais de raffinage car je peux, à l’infini du temps de ma vie – c’est Woody Allen qui disait que l’éternité c’est long, surtout vers la fin ; pensait-il à Xanthippe ? – commenter ce que je vois, ce que je comprends et pense. Mais je vois trop que j’en reviens toujours au même point, au même niveau de colère et d’angoisse. Et si je suis né comme ça, je mourrai mêmement, que cela vous plaise ou non. Cette modernité de merde, entièrement formatée par l’attelage du Marché et de la Bureaucratie gouvernementale sur un mode consumériste, me gave ; et me révulse tant je pense qu’une autre modernité était possible. Et ses valeurs qui ne sont que des contrevaleurs me font gerber. À vingt ans, je « militais » déjà, un peu naïvement, dans un groupuscule anarchiste. Bien des années plus tard, alors que la logique, le syndrome « Dany le Rouge » devrait être, qu’en prenant des rides, du ventre, et en perdant ses cheveux, on devienne macroniste, je suis en fait devenu ce que j’étais déjà, mais en plus enragé, en plus radical, en plus désespéré. Et j’ai envie de vous crier à tous « je suis toujours un anarchiste et je vous emmerde… » Un anarchiste modèle « Élisée Reclus », libertaire, démocrate tout en étant anti parlementariste, anti religieux sans être nécessairement athée, non-violent mais sans faiblesse – je t’aimerai si je le peux, je te tuerai si je le dois –, féministe en assumant ma virilité (bien qu’aujourd’hui assez fatiguée), naturaliste, écologiste… Un mélange improbable et écartelé entre Proudhon et Tolstoï, Thoreau et Jean-Marie Guyau, Arendt et Ain Rand, Weil et Camus, sans oublier Nietzche, l’antéchrist. Et puis, et puis… individualiste jusqu’au bout du bout, « jusqu’au trognon » pour paraphraser Céline, méprisant les normes, les modes, le politiquement correct, la culture institutionnalisée. Enfin, je suis, bien malgré moi, un mal blanc occidental et capable d’écrire cent essais pour dire tout le mal que je pense de la civilisation judéo-chrétienne. Mais c’est ma famille, c’est comme ça ; et si demain il faut entrer dans une guerre de civilisation, je ferai ce que Reclus fit pour la Commune de Paris, je prendrai les armes pour défendre mes racines, si douteuses soient-elles, et si les forces me manquent, ma hargne de bête fatiguée y palliera.   

Faim de vie, fin de vie…

Un peu de politique avant les fêtes, ça ne peut pas faire de mal. Je ne parlerai pas de la guerre d’Israël contre le Hamas, ni même de celle, oubliée, que l’Ukraine mène pour survivre, tout cela est de peu de poids dans les médias face à l’affaire Depardieu, une affaire dont on sait peu de choses, que la police n’a pas finie de traiter, mais sur laquelle tout le monde a un avis. Même notre président qui prend le contrepied de sa ministre de la culture… Non, je veux vous parler de deux autres choses, infiniment plus importantes – non pas, évidemment, plus qu’une guerre, mais plus qu’une série d’agressions sexuelles, quand bien même seraient-elles inexcusables pour peu qu’elles soient avérées.

Notre président rappelait donc récemment que l’avortement est un droit fondamental. Je ne sais pas… mais je pense que c’est un droit qu’il faut préserver, celui de donner la mort à un être vivant que l’on porte, dont on pense qu’il n’est pas encore conscient et dont on ne veut pas. Mais, s’agissant du droit de se donner la mort, je pense que l’on peut considérer que ce dernier est bien plus fondamental ; et je pense intéressant d’opposer l’un à l’autre : d’un côté, il s’agit, pour une femme, de mettre un terme prématuré à une vie qu’elle porte, une grossesse non désirée ; de l’autre, il s’agit – je pense affectueusement à François Hardy – de mettre un terme à ses souffrances, au terme naturel d’une vie. Mais ce droit fondamental nous est refusé, au moins en France. Pourtant, les deux seuls droits fondamentaux sont bien ceux de vivre et de mourir. Et si je pense à l’esclavage, c’est que survivre quand on est très diminué, fortement handicapé par la maladie, c’est bien une forme d’esclavage, d’absence totale de liberté. L’esclavage, la France l’a aboli, mais très tardivement, bien après d’autres nations : Le Danemark en 1792, l’Angleterre en 1807, les États-Unis en 1808, la France en 1848. Oui, la France a toujours été à la traine sur le plan moral, bien que l’on aime prétendre le contraire et donner des leçons. L’arrogance française a toujours agacé nos voisins.

Mais je voulais aussi évoquer la fin de vie sur un autre registre. Il y a quelques jours, Keith Richards a fêté ses 80 ans. Il continue à vivre, semble-t-il, et ses fans attendent avec impatience le big concert qu’il fera pour fêter ses cent ans. Beaucoup, à cet âge, sont déjà morts ou se contentent de survivre sans disposer de leur totale autonomie. Car ce qui fait la vie, c’est l’autonomie ; après, ce n’est que survie. Et c’est pourquoi ce qui est important, ce n’est pas de mesurer l’évolution du temps disponible entre la naissance et le décès, mais le temps de vie, sachant que le temps de survie, en EHPAD ou ailleurs, n’est pas un temps de vie. Je lisais il y a peu d’années que l’espérance de vie avait commencé à diminuer aux États-Unis ; aujourd’hui, je découvre un article de Joséphine Boone, publié le 22 décembre, nous expliquant que « selon les derniers chiffres de la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques, l’espérance de vie sans incapacité à 65 ans a reculé en 2022 par rapport à l’année précédente ». J’y lis aussi que ce chiffre reste encore positif par rapport à 2018 et qu’il faudra attendre pour y voir éventuellement une vraie tendance.

Ce que j’avais écrit alors, découvrant les chiffres états-uniens, c’est que, malgré tout ce que l’on nous dit, malgré les sommes extravagantes et les technologies savantes que l’on met au service de notre survie, l’espérance de vie – telle que je la considère – baisse en Occident. Et le Système s’en fout, car, pour lui, ce n’est qu’un simple dégât collatéral d’un certain mode de développement qu’il ne souhaite surtout pas modifier. C’est dire qu’en Occident, on vit de plus en plus mal, mais que l’on survit de plus en plus longtemps. Pour décrire cela, il existe un mot peu usité hors du cadre philosophique, c’est l’antonyme de progrès, le regrès.

Sur ce, Joyeux Noël !

Retour à l’actualité, comme une parenthèse ouverte sur le malheur

J’entends aussi qu’il faudrait trouver une issue politique à cette crise. Évidemment ! Mais de quoi parle-t-on ? De la revendication du Hamas, ou de celle de l’Autorité palestinienne ? Car ils ne souhaitent pas la même chose. L’Autorité palestinienne représente, mal, les Palestiniens qui souhaitent avoir leur état indépendant et la possibilité d’y vivre et d’y élever leurs enfants. Et cette fameuse solution à deux états est donc absolument indispensable.

Mais ce n’est pas l’objectif du Hamas qui ne s’en contentera pas et qui a toujours fait échouer tout projet de règlement. Car il souhaite l’éradication d’Israël, la fin du « Royaume de Jérusalem ». Et, non seulement la création d’un état palestinien qui sera vite militarisé par l’Iran, et dont le Hamas prendra « démocratiquement » la direction, ne règlera rien, mais cela rendra probablement la position d’Israël plus fragile encore, et conduira à un nouvel embrasement de la région, puis à une réaction encore plus forte d’Israël. Car le risque est là. Imaginons ce nouvel état aux mains du Hamas, largement financé par le Qatar, armé jusqu’aux dents par l’Iran, associé à un Etat libanais subverti par le Hezbollah, ces forces se retournant contre l’Égypte… Mais les choses seront effectivement plus claires, avec une guerre plus traditionnelle état contre état. Et nous verrons alors, quand le nouvel État palestinien sera prêt à perdre la guerre, quelles coalisions se créeront pour mener cette guerre de civilisation. 

On voit donc que pour éviter ce risque, si la création d’un État palestinien viable est indispensable, cet état devra absolument être démilitarisé, et l’ONU devra garantir cette démilitarisation. Les Russes et les Chinois y sont-ils prêts ?

Oui, la guerre encore…

Car je souhaitais répondre à Dominique de Villepin qui faisait il y a quelques jours une matinale de France Inter, que le Royaume de Jérusalem n’a pu tenir que deux siècles…

Ni avec la dernière attaque du Hamas ni par la réponse d’Israël, nous n’entrons dans une guerre de civilisation, comme notre ancien ministre le craint. Nous y sommes déjà, depuis le début, c’est-à-dire depuis le VIIe siècle de l’ère chrétienne. L’expansion de l’Islam a en effet débuté dès 622, date de l’Hégire, quand le fondateur de la nouvelle religion révélée a quitté La Mecque pour Médine ; en fait plutôt dans les toutes premières années qui ont suivi, car tout est allé très vite : prise de La Mecque en 630, campagne militaire de Tabouk l’année suivante, création d’un premier Kalifa à la mort du Prophète, en 632. Depuis, l’Oumma croît, car l’Islam (religion et idéologie) progresse partout, et cette nouvelle civilisation arabo-musulmane qui est par exemple venue à bout de la civilisation perse, s’est vite heurtée à la civilisation occidentale, plus ancienne qu’elle. Car elle a extrêmement rapidement conquis toute la péninsule arabe, l’Afrique du Nord, le Levant, le pourtour méditerranéen, une partie de l’Europe du Sud et l’Empire romain d’Orient… Et bien d’autres régions depuis…

Les chrétiens menacés ont réagi dès le VIIIe siècle : Le royaume franc de Charles Martel les arrêtant là où on sait ; et les forces chrétiennes reconquérant très progressivement la péninsule ibérique, sur plusieurs siècles, depuis l’escarmouche de Covadonga en 722, jusqu’à la prise du dernier bastion musulman, à Grenade, en 1492, par les rois très chrétiens Isabelle de Castille et Ferdinand d’Aragon. Ce fut d’ailleurs le début d’une nouvelle séquence pour l’Occident qui partira à la conquête des Amériques, puis de l’Afrique noire, sacrifiant d’autres civilisations sur l’autel de sa propre expansion religieuse et politique. Mais d’abord, le Christianisme a aussi voulu revenir aux sources et a organisé plusieurs croisades pour reconquérir Jérusalem. Et la création du royaume chrétien de Jérusalem en 1099 a été une nouvelle séquence de cette guerre de civilisation. Évidemment, les islamistes ne pouvaient accepter ce qu’ils considéraient comme un sacrilège, une présence chrétienne sur une terre sanctifiée par la naissance de leur Prophète. Cette enclave disparaitra en 1291 avec la chute de Saint-Jean-D’acre. Ils ne pouvaient l’accepter, comme les Arabes refusent l’historicité d’une présence chrétienne sur leurs terres, aux premiers siècles de notre ère (c’est-à-dire un demi-millénaire avant la naissance de leur religion), et détruisent systématiquement les témoins archéologiques de cette présence dès qu’ils en exhument de leur linceul de sable.

Et il aura fallu attendre la fin de la Première Guerre mondiale pour que l’Empire ottoman disparaissant, libérant les Arabes du joug turc, et que la Société des Nations (une structure internationale n’ayant d’autre objet que d’imposer à notre planète l’idéologie occidentale, c’est-à-dire surtout américano-anglaise) impose la présence occidentale au Moyen-Orient (protectorat anglais sur la Palestine), pour que l’Occident prenne sa revanche. Et la création en 1947, après que les nazis aient perpétué la Shoa, après que les autorités islamiques de Jérusalem se soient compromises avec les nazis, va permettre la création d’un nouveau « royaume occidental » de Jérusalem.

Évidemment, les islamistes ne peuvent l’accepter et même si cela leur prend deux siècles veulent l’élimination d’Israël – la cause palestinienne n’étant qu’un détail de l’histoire, un prétexte, la réparation d’un dégât collatéral.

On peut donc dire que le Hamas s’inscrit dans une tradition millénaire, et messianique. Et ses crimes de guerre génocidaires et assez dégueulasses … redisons-le … s’inscrivent dans la macabre logique de la guerre religieuse. Qu’on réinterroge l’histoire, les guerres de religion ont toujours été, systématiquement, l’occasion de crimes de guerre atroces ; et aucune religion ne s’est montrée particulièrement encline à respecter l’homme, la femme, l’enfant… Car si on peut imaginer « humaniser » une guerre faite au nom d’un état, d’enjeux économiques, de problèmes démographiques, c’est-à-dire d’une structure politique, en rédigeant par exemple des conventions internationales, on ne peut humaniser une guerre faite au nom de Dieu, puisqu’il s’agit de « sauver des âmes » en convertissant, ou, à défaut, en tuant des mécréants égarés dont le statut est alors bien inférieur à celui d’un homme, puisqu’ils n’appartiennent pas au peuple de dieu.

Et c’est là où Dominique de Villepin se trompe, en considérant que seule la création d’un état palestinien règlerait le problème. Cette création est absolument nécessaire, mais ne règlera rien, car ce n’est pas ce que veut le Hamas et ce n’est pas ce que demandent les islamistes purs et durs.

On finira donc par sortir de cette crise – à quel prix ? –, mais la guerre va continuer sans que l’on puisse en prévoir la fin, les Occidentaux pouvant compter sur leurs arsenaux militaires et leur maîtrise technologique (voir Israël) ; les musulmans comptant sur les ventres de leurs femmes, leur mépris de l’individu, mais surtout la décadence occidentale – qui porte le doux nom d’humanitarisme, mais qui n’est, comme Nietzche l’a bien montré, qu’un abaissement ; les premiers produisant des canons, les seconds de la chair à canon… 

Nous sommes donc coincés par cette Histoire, étranglés par cette réalité historique aujourd’hui prégnante, contraints d’accepter les faits que le Hamas nous a rappelés de la manière la plus horrible, en l’occurrence cette guerre, ou bien de répondre à côté, de regarder ailleurs, de nous coucher – l’esprit de Munich, les idiots utiles qui manifestent à contretemps leur solidarité avec les palestiniens. Mais il y a aussi une troisième voie, celle dont Houellebecq a fait un roman, nous soumettre, trahir ce que nous sommes pour espérer sauver notre peau, et en sortir par le haut, devenir de bons musulmans… Car il ne faut pas trop compter sur les musulmans pour, tout en gardant leur foi, accepter de s’occidentaliser. Car Ils ne peuvent le faire sans justement renier leur foi.