Archives de catégorie : Revue de presse

Je suis Charlie.

Le 7 janvier 2015, en fin de matinée, deux islamistes radicaux ont attaqué les locaux de Charlie Hebdo et ont tué ou blessé une vingtaine de personnes. C’est un acte de guerre commis par deux djihadistes français recrutés et formés par des fondamentalistes qui ont probablement programmé et organisé cette opération. Il y aura d’autres actes de cette nature en France et pas seulement à Paris et nous devons psychologiquement et matériellement nous y préparer.

Nous sommes en guerre ; et cette guerre est une guerre de civilisation qui oppose une mouvance qui essaye de se constituer en État et l’Occident. Ces djihadistes contestent et combattent en effet les trois piliers de notre civilisation : la démocratie parlementaire, l’économie capitaliste et la morale judéo-chrétienne ; et s’attaquent aux symboles de ces trois piliers.

Nous n’avons malheureusement qu’une réponse globale possible : Défendre notre civilisation qui est pourtant décadente et contestable par bien des côtés ; réformer notre modèle pour qu’il prête de moins en moins à la critique ; faire vivre nos valeurs : liberté, laïcité, solidarité ; se serrer tous les coudes ; ne pas se laisser instrumentaliser par l’État qui, en temps de guerre, a toujours tendance à renforcer son pouvoir sur les individus, notamment par des lois d’exception.

Dans une allocation télévisée solennelle, Le Président de la République a décrété une journée de deuil national (le 8), et a appelé à l’union nationale. En réponse à une énorme émotion, un nombre considérable de nos concitoyens se sont spontanément regroupés pour communier avec dignité dans leur douleur et partager leur effroi. Et puis, très vite, les politiques ont repris la main mettant un terme à ce moment de grâce douloureuse.

Notre ancien président avait tout fait pour être le premier à exprimer des propos convenus dans une mise en scène et une posture et qui était celle d’un président en exercice. Tous les installés du système ont rappelé leur amour pour ce journal et leur admiration pour ces journalistes qui pourtant combattaient le système. Le parti socialiste s’est chargé de l’organisation d’une « marche républicaine[1] », en invitant presque tous les partis à y participer, ostracisant un parti soutenu aux élections républicaines par une minorité de plus en plus importante des citoyens. Les syndicats ont joué des coudes pour en être, et si possible en tête de cortège.

Tout rendre donc dans l’ordre républicain. Et le FN pourra se réjouir de gagner encore quelques points ; quant à Houellebecq, quel sens de l’à-propos et de l’anticipation. Tout cela me laisse un gout amer.



[1]. Sans nous en expliquer le concept. Rappelons que l’Iran est une république islamique parfaitement légitime, sur la plan du droit, à se prévaloir du qualificatif de république.

Pour ou contre le droit de grève militaire.

La Cour Européenne des Droits de l’Homme de Strasbourg a donc jugé que les militaires français ont le droit de se syndiquer. Prenons bien de la mesure de la chose.

Mais tout d’abord n’assimilons pas la C.E.D.H et la Cour de Justice de l’Union Européenne, qui sont l’un et l’autre des tribunaux, pour le premier produit du Conseil de l’Europe[1] auquel la France a adhéré en mai 1949 et pour le second de l’U.E, Conseil et Union ne se superposant pas. Cet arrêt démontre que toute adhésion à une organisation supranationale est la porte ouverte à une perte de souveraineté.

Et notre pays a donc abandonné la sienne. Insistons sur ce point, non pas pour le déplorer, mais plus simplement pour le constater. La France n’est plus un État souverain, même si l’État français garde beaucoup de prérogatives, mais de plus en plus encadrées par des textes européens et internationaux. Notre pays a perdu sa capacité à gérer sa monnaie, aujourd’hui elle perd – même si cela prendra un peu de temps et passera par quelques étapes emblématiques – sa souveraineté militaire. Chacun jugera si c’est la meilleure des choses dans le pire des mondes, ou l’inverse.

Comprenons le problème. Si l’État est condamné à autoriser les militaires à se syndiquer, comment ce même état pourrait-il autoriser certains syndicats et en interdire d’autre ? Sur quelles bases ? Demain – ou peut-être après demain, il y aura donc, inéluctablement, des soldats à FO des marins CGTistes (avec le pompon rouge), des aviateurs affiliés, à la CFDT, ou à Sud. Et comme l’arme de base (de poing ?) du syndicat est la grève, nous aurons des soldats en grève, peut-être pour réclamer le droit de grève. Et les syndicats demanderons légitimement à être associés à l’élaboration du livre blanc de la Défense Nationale, revendiquerons dans la rue des budgets complémentaires, exigeront d’être représentés dans les Etats-majors pour discuter des stratégies ou des territoires d’intervention.



[1]. Le Conseil de l’Europe qui est l’organisation promotrice de la Convention Européenne des droits de l’homme est le volet moral de l’O.C.D.E.

Revue de presse.

M. Valls déclare cette semaine à propos de la grève des pilotes d’Air-France qu’elle est « insupportable ». Que veut-il dire exactement en utilisant un mot si ambigu ? Que cette grève serait financièrement insoutenable pour la compagnie et pour l’économie française ou bien qu’elle serait intolérable, inadmissible, car exorbitante du bon sens ou de la moral ? Il me semble que de rajouter qu’elle « est insupportable […] pour l’image de la France à l’étranger » clarifie malheureusement son propos. Il n’accepte pas cette grève, ce que l’on peut comprendre, mais il le dit, ce qui me parait être une erreur. Et je m’étonne de cette déclaration d’un premier ministre en exercice. Car, soit il reconnait le droit de grève dans les termes qui sont ceux de notre législation, et il doit l’accepter quoiqu’il en pense, soit il considère que l’intérêt de la Nation ou de l’État justifie des limites à ce droit, auquel cas, non seulement il doit le dire, mais il doit aussi demander à l’Assemblée de légiférer pour poser ces limites. Mais en aucun cas, il ne peut contester à une catégorie sociale d’utiliser son droit.

Le tribunal prud’homal de Lyon vient de condamner la société Carrefour pour avoir licencié une caissière qui ne respectait pas son règlement intérieur qui stipulait que les personnes en contact avec la clientèle ne pouvaient arborer avec ostentation des signes politiques ou religieux (ici le port du foulard, …). Les deux partis peuvent faire appel. Mais le pouvoir politique va-t-il se saisir de cette décision, la contester devant les tribunaux, voire légiférer si cela s’avère nécessaire ? Il doit le faire, à un moment ou à un autre, pour au moins deux raisons : l’une de cohérence, l’autre pour préserver nos valeurs. Le règlement intérieur de l’entreprise avait été déposé auprès de services de la Préfecture qui avaient tout loisir de le contester. Les délégués du personnel de la grande surface auraient pu aussi le faire. Ils l’ont tous accepté. Le juge conteste ce règlement, tardivement, et trouble, me semble-t-il, la jurisprudence (se rappeler de l’affaire baby loup). Le principe de laïcité impose que dans les lieux publics, on s’abstienne de tenues religieuses : porter la cornette pour les bonnes sœurs, le voile islamique pour les musulmanes, … Au moment où un français se fait égorgé par des allumés du bocal qui prétendent, en massacrant un guide de montagne dont personne ne connait les options religieuses, défendre la cause de dieu, ne pas être intransigeant sur la laïcité ne serait pas une erreur mais une faute lourde.

Je note enfin la création par M. Bennahmias (ex Modem) d’un nouveau parti politique qu’il présente comme social-démocrate, écologiste, laïc et républicain. Une nouvelle escroquerie … Souhaitons-lui long feu.

Si ce parti est social-démocrate, au sens politicien du terme, il se satellisera autour de l’UMPS et ne sera donc ni social ni démocratique. Et comme la laïcité et la démocratie c’est la même chose, ou pour le dire autrement, ces concepts recouvrent le même objet politique, ce nouveau mouvement de non-pensée ne sera pas plus laïc. Quant à être républicain, qu’est-ce que ça veut dire ? Comment un parti politique pourrait-il ne pas l’être ? Attendons donc sans illusion le programme de ce parti pour y juger les mesures qui promouvront et la démocratie et la laïcité.

Revue de presse.

Notre président national faisait le 2 septembre dernier sa rentrée des classes à Clichy-sous-Bois. Il ne pleuvait pas. Je note dans mon quotidien qu’il aurait déclaré que « L’école doit […] faire en sorte que les élèves puissent être pleinement préparés aux besoins de l’économie ». Qu’un homme qui se prétend de gauche tienne ce type de propos est sidérant, et je préfère imaginer que sous la pression qu’il subit – pourtant il ne pleuvait pas –, il en arrive à dire absolument n’importe quoi. Personnellement, je ne pense pas, d’une part que les élèves qui sont des citoyens en puissance doivent réponde aux besoins de l’économie, d’autre part que l’école, donc l’État, doive les y aider ou les y pousser. J’imaginais un peu naïvement qu’un homme de gauche pensait que l’économie devait répondre aux besoins des citoyens – qu’ils le soient dans leur pleine maturité, ou en devenir – et non l’inverse. Je me suis trompé, mea culpa… Pour notre président, c’est bien le contraire. Je pensais que l’État, incarné par ses ministères régaliens, saurait rappeler l’économie à l’ordre républicain. Mme Vallaud-Belkacem, qui n’a pas démenti son chef de parti, est visiblement sur cette ligne qui assujettit l’école à l’économie. Pourquoi ne pas proposer alors que le Ministère de l’Éducation Nationale devienne un secrétariat d’Etat placé sous l’autorité du Ministère de l’Économie et des Finances ?

 

Gérard Filoche, membre du bureau national du Parti Socialiste, s’exprimant sur le contrôle des chômeurs souhaité par le Ministre du Travail, déclare « ça n’a rien de républicain, rien de social, c’est même scandaleux ». Chacun peut comprendre que le fait pour un ministre de la république d’engager des mesures non républicaines ou antisociales soit scandaleux. Mais je m’interroge sur le caractère non républicain du contrôle des chômeurs. Qu’est-ce qu’une république ? C’est un régime politique qui garantit aux citoyens l’État de droit. Ainsi, une monarchie constitutionnelle comme celle instituée en France en septembre 1791 par la volonté du Tiers-Etat, est une république. Vérifier qu’un chômeur indemnisé respecte la loi, qu’il use de ses droits sans tricher, viole-t-il le droit de la république, c’est-à-dire l’ordre républicain ? J’avoue avoir un peu de mal à comprendre la cohérence du propos.

Émotion chez les démocrates de tout poil : Les chinois veulent affirmer et affermir leur pouvoir sur Hong-Kong et, malgré la promesse faite à la Grande-Bretagne lors de la rétrocession en 1997 de la colonie à la République Populaire de Chine de maintenir l’élection de l’exécutif au suffrage universel, approuver la liste des candidats – voire en changer des noms. Les démocraties occidentales trouvent scandaleux que la Chine, donc en fait le Parti Communiste Chinois, désigne ou adoube les candidats aux élections, parmi lesquels le peuple hongkongais choisira son exécutif. Ce serait, malgré le respect du suffrage universel, un déni de démocratie. Mais je croyais que c’était comme cela que ça fonctionnait en occident, et que les partis politiques y avaient le monopole de la désignation des candidats.